Les sites de comparaison se multiplient et touchent aussi le marché des produits
Qu’est-ce qu’un comparateur en ligne ?
Défini à l’article L. 111-6 du Code de la
Le décret du 22 avril 2016 ne s’attarde pas seulement à définir la notion de « comparateurs en ligne ». Il prévoit également le régime qui leur est applicable, lequel n’est, par ailleurs, que provisoire. En effet, il sera remplacé par le régime des plates-formes en ligne, lorsque les mesures réglementaires nécessaires à l’application de l’article L. 111-7 du Code de la consommation entreront en
Ce qui aboutira, par la suite, à l’abrogation des articles L. 111-6 et L. 131-3 du Code de la
Définis à l’article L. 111-7 du Code de la consommation, ces opérateurs désignent des personnes physiques ou morales « proposant, à titre professionnel, de manière rémunérée ou non, un service de communication au public en ligne, reposant sur […] la mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service ». Cet article L. 111-7 du Code de la consommation a été institué par la loi pour une République
Une nécessaire protection du consommateur
Les comparateurs en ligne sont soumis à une obligation générale, qui est celle de fournir au consommateur une information loyale, claire et transparente. Une telle obligation est formulée à l’article L. 111-6 du Code de la consommation.
L’objectif clairement affiché est de soumettre les comparateurs en ligne à une transparence totale à l’égard des consommateurs, laquelle se traduit par une certaine clarté, compréhensibilité et accessibilité de l’information fournie par le site comparateur aux consommateurs. Concrètement, ce dispositif relatif à l’obligation d’information pesant sur le comparateur en ligne doit permettre aux consommateurs d’avoir accès à l’ensemble des informations relatives au fonctionnement des comparateurs en ligne et à leurs relations avec les professionnels référencés sur leur site.
La mise en œuvre de l’obligation d’information « loyale, claire et transparente »
Après avoir posé le principe d’une obligation d’information loyale, claire et transparente pesant à l’encontre du site comparateur en ligne et plus largement de toute plate-forme en ligne, le décret du 22 avril 2016 est venu déterminer les contours d’une telle
Les dispositions dudit décret, entrées en vigueur le 1er juillet 2016, précisent ainsi le type d’activité de comparaison soumis aux obligations d’information et énumère un nombre conséquent d’informations que le comparateur devra mentionner sur son site, dans une rubrique explicative spécifique. Une telle rubrique devra être accessible sur toutes les pages du site et devra être matérialisée par une mention ou un signe distinctif.
Parmi les informations qu’il devra communiquer aux consommateurs, le comparateur en ligne devra indiquer les critères à partir desquels il se fonde pour procéder au classement des offres de biens et de services qu’il propose à la comparaison. Par exemple, l’existence d’une rémunération par les professionnels aura de grande chance d’impacter le classement de leurs offres. Le comparateur en ligne devra également préciser l’existence de liens contractuels ou capitalistiques avec les professionnels qu’il référence sur son site. Ces deux obligations d’information, présentées par le décret du 22 avril 2016 à l’encontre des comparateurs en ligne, ont été reprises dans la loi pour une République
S'agissant des biens et des services comparés, les consommateurs doivent être informés sur leurs caractéristiques essentielles et leurs prix, incluant tous les frais, commissions, intérêts et taxes, ainsi que les éventuelles garanties commerciales pour les
Le renforcement issu de la loi pour une République numérique
La loi pour une République numérique a instauré des obligations nouvelles à l’encontre de l’ensemble des opérateurs de plates-formes en ligne, y incluant les comparateurs en ligne.
Il est notamment prévu l’obligation par ces derniers de délivrer au consommateur une information relative à la qualité des annonceurs qu’ils
Il est également prévu à l’encontre des opérateurs de plates-formes en ligne une obligation d’information relative aux droits et obligations des parties en matière civile et
Par ailleurs, dans le cadre d’une mise en relation « B to C », l’opérateur devra mettre à disposition des professionnels un espace leur permettant de communiquer aux consommateurs toutes les informations obligatoires relatives aux contrats conclus à distance prévues aux articles L. 221-5 et L. 221-6 du Code de la consommation.
L’article 242 bis du Code général des impôts prévoit notamment l’obligation pour les plates-formes en ligne de fournir à
- à l’occasion de chaque transaction, une information loyale, claire et transparente sur les obligations sociales et fiscales qui incombent aux personnes qui réalisent des transactions commerciales par leur intermédiaire ;
- un lien électronique vers les sites des administrations permettant de se conformer, le cas échéant, à ces obligations.
Ces obligations d'information s'adressent aux personnes résidant en France ou réalisant des ventes ou des prestations de service en France.
Enfin, la loi pour une République numérique entend renforcer la mise en place de « bonnes pratiques », en imposant leur mise en œuvre auprès d’opérateurs de plate-forme en ligne dont l’activité dépasserait un certain seuil de
Les sanctions relatives à la violation de l’obligation de transparence
Le manquement à l’obligation d’information par des comparateurs en ligne a déjà eu l’occasion d’être sanctionné sur le fondement de pratiques commerciales déloyales et trompeuses, incriminées aux articles L. 120-1 et L. 121-1 du Code de la
Désormais, des sanctions spécifiques aux comparateurs en ligne sont prévues. Ainsi, en cas de manquement à l’une des obligations d’information pesant sur le comparateur en ligne, l’article L. 131-3 du Code de la consommation prévoit la possibilité pour ce dernier d’être puni d’une amende administrative d’un montant maximum de 75 000 euros à l’encontre des personnes physiques et jusqu’à 375 000 euros pour les personnes morales. Cette amende administrative devra être prononcée par la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF), conformément à la procédure prévue au Chapitre II du Titre II du Livre V du Code de la consommation. Une telle procédure prévoit, notamment, une mise en demeure préalable à l’encontre de la personne sanctionnée, et la faculté par cette dernière de présenter ses observations en réponse.
Il est à noter que les dispositions de l’article L. 131-3 du Code de la consommation seront amenées à disparaître, lorsque les mesures réglementaires permettant l’application de l’article L. 111-7 du Code de la consommation entreront en
En outre, la loi pour une République numérique ouvre également la possibilité aux agents de la DGCCRF de disposer de pouvoirs d’enquête, dans le cadre de la mise en œuvre par les plates-formes en ligne de « bonnes pratiques », telles que prévues à l’article L. 111-7-1 du Code de la consommation. Dans un tel contexte, les agents de la DGCCRF pourront recueillir auprès des opérateurs de plates-formes en ligne, et conformément à l’article L. 511-6 du Code de la consommation, toute information utile leur permettant de mener à bien leurs missions d’enquête. Ils pourront également diffuser, de manière périodique, les résultats de ces évaluations et procéder à des comparaisons entre plates-formes. À cette fin, une liste des plates-formes en ligne, ne respectant pas les différentes obligations qui pèsent sur elles, pourra être rendue
Vers un régime propre aux comparateurs en assurance ?
Une directive
La directive DIA 2 poursuit plusieurs objectifs. L’un d’entre eux est de mettre en place un marché européen unique, favorisant une concurrence équitable entre les différents acteurs intervenant dans le domaine assurantiel. Pour y parvenir, la directive DIA 2 est venue étendre son champ d’application à l’ensemble des distributeurs en assurance. Désormais, elle vise à la fois les producteurs, les intermédiaires, les vendeurs d’assurance à titre accessoire mais encore les comparateurs en
Par ailleurs, la directive DIA 2 tend à renforcer les exigences en matière d’information et de protection des consommateurs. À ce titre, l’assuré devra disposer de l’ensemble des informations lui permettant de comprendre les caractéristiques essentielles au contrat d’assurance qu’un intermédiaire en assurance sera amené à lui proposer et lui permettre de comparer ce contrat sur le marché. Les assurés devront, notamment, recevoir des informations relatives au statut des distributeurs d’assurance ou encore au coût total du contrat d’assurance, incluant les frais liés aux conseils et aux services pour certains produits d’assurance vie « complexes ». Par ailleurs, il incombe aux assureurs d’être totalement transparent quant à la nature de leur rémunération (honoraires, commission, tout autre avantage économique). Il incombe également aux États membres de veiller à ce que les intermédiaires en assurance ne privilégient pas leur rémunération en proposant aux consommateurs le produit assurantiel le plus rentable pour eux, au détriment des intérêts
Parmi les autres obligations pesant sur les distributeurs en assurance, la directive DIA 2 prévoit l’obligation pour ces derniers de suivre au moins 15 heures annuelle de formation continue ou de développement professionnels, en prenant en compte la nature des produits vendus, le type de distributeur, la fonction qu’ils occupent ainsi que l’activité exercée au sein du distributeur de produits d’assurance ou de réassurance.
Enfin, les intermédiaires seront également tenus de souscrire une assurance Responsabilité Civile afin de couvrir leur éventuelle faute professionnelle, à raison d’au moins 1,25 million d’euros par sinistre et 1,85 million globalement pour l’ensemble des sinistres survenus au cours d’une année.
À compter de la transposition à venir de la directive DIA 2 en droit français, les comparateurs en assurance devront se soumettre non seulement aux exigences mentionnées à l’encontre des opérateurs de plates-formes en ligne mais également aux exigences formulées à l’encontre des intermédiaires en assurance et en
Le marché unique numérique de la Commission européenne et la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales
Si les comparateurs en ligne, et plus largement l’ensemble des opérateurs de plates-formes en ligne, sont tenus de garantir une loyauté dans leurs relations avec les consommateurs, un tel principe apparaît également fondamental dans la relation entre plates-formes en
S’agissant plus spécifiquement des comparateurs, la directive 2005/29/CE relative aux pratiques commerciales déloyales contient diverses dispositions susceptibles d’être appliquées aux « SCP » (sites de comparaison des prix) et aux outils d’évaluation par les consommateurs :
- les articles 6 et 7 interdisent aux professionnels de se servir des SCP pour faire des déclarations trompeuses, en omettant des informations substantielles notamment au sujet du prix et/ou de la disponibilité des produits et services ;
- le point 18 de l’annexe I prohibe en toutes circonstances la pratique consistant à « communiquer des informations factuellement inexactes sur les conditions de marché ou sur les possibilités de trouver le produit, dans le but d’inciter le consommateur à acquérir celui-ci à des conditions moins favorables que les conditions normales de marché » ;
- la directive exige en outre qu’il soit clairement indiqué si un SCP est indépendant, exploité ou (directement ou indirectement) parrainé par un professionnel (voir l’article 6, paragraphe 1, points c) et f), et
l’article 7) .[36]
Une véritable prise de conscience semble avoir frappé l’esprit du législateur français sur la nécessité d’adapter le cadre juridique aux évolutions du e-commerce. Partant d’un simple encadrement des comparateurs en ligne, le législateur français s’attaque aujourd’hui à une cible plus large, celle des plates-formes en ligne. Pour que cette réforme prenne toute son ampleur, reste encore au législateur français le soin de publier dans les plus brefs délais les décrets nécessaires à la pleine application de la loi pour une République numérique. Axelle Lemaire, Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances, chargée du Numérique et de l'Innovation, avait d’ailleurs exprimé devant le Sénat, en septembre dernier, son souhait de publier ces décrets dans les six mois suivant la promulgation de la loi pour une République numérique. L’orientation que prendront les autorités européennes jouera également un rôle essentiel dans le perfectionnement de cette réforme par le législateur français. Affaire à suivre donc…
Bibliographie
« Sites comparateurs en ligne : du nouveau sur les obligations d’information », Revue Lamy droit des affaires, n° 115, 1er mai 2016.
« Contrat », Revue Lamy Droit civil, n° 138, 1er juin 2016.
Directive sur la distribution d’assurance, Lamy, août 2016, 4654.
« Protection du consommateur – Publication du décret relatif aux sites comparateurs en ligne », La Semaine juridique entreprise et affaires, n° 18, 5 mai 2016, act. 379.
Christophe Clarenc et Martin Drago, Régulation des plates-formes numériques : état des lieux et des divisions, Édition Multimédia, 25 avril 2016, n° 144.
Audrey Fallet, « Intermédiation : vers une nouvelle directive DIA 2 », Revue Banque, 11 mai 2015.
Jacques Larrieu, Christian Le Stanc et Pascale Tréfigny, Droit du numérique, Dalloz, 2013, 2487.
Cédric Manara, « Comparer et classer, est-ce promouvoir ? », Dalloz actualité, 13 décembre 2012.
Élise Poillot, Plates-formes en ligne : portée de l'obligation de loyauté, Dalloz 2016, 2056.